Taqawan de Eric Plamondon

Résumé

« Ici, on a tous du sang indien et quand ce n’est pas dans les veines, c’est sur les mains. »

TAQAWANLe 11 juin 1981, trois cents policiers de la sûreté du Québec débarquent sur la réserve de Restigouche pour s’emparer des filets des Indiens mig’maq. Emeutes, répressions et crise d’ampleur : le pays découvre son angle mort.

Une adolescente en révolte disparaît, un agent de la faune démissionne, un vieil indien sort du bois et une une jeune enseignante française découvre l’immensité d’un territoire et toutes ses contradictions. Comme le saumon devenu taqawan remonte la rivière vers son origine, il faut aller à la source…..

Histoire de luttes et de pêche, d’amour tout autant que de meurtres et de rêves brisés, Taqawan se nourrit de légendes comme de réalités, du passé et du présent, celui notamment d’un peuple millénaire bafoué dans ses droits.

Ma lecture

Ecrire un roman et en faire un document à charge sur l’expropriation des Amérindiens de leur territoire, prendre le prétexte d’une enquête sur la disparition d’une jeune mi’gmaq pour retracer les émeutes de 1981 à Restigouche en Gaspésie, ce territoire au nord-ouest du Québec, pour empêcher la pêche traditionnelle du saumon, le Taqawan, (nom donné en langage mi’gmaq au saumon quand celui-ci revient sur sa terre natale), cette pêche ancestrale pratiquée pour nourrir les familles d’amérindiens et ainsi porter un regard critique sur la politique du gouvernement de l’époque, voilà ce que Luc Plamondon s’est attaché à nous décrire dans ce court roman.

Alternant les éléments documentaires et une enquête menée par un garde-pêche désabusé sur la disparition d’Oceane 15 ans, amérindienne violée et séquestrée,  l’auteur nous éclaire sur l’implication de l’état dans la situation des premiers occupants de cette terre, n’hésitant pas à utiliser la force, l’humiliation pour les réduire au silence et parfois à la fuite.

Mais il évoque également l’incroyable volonté de certains à rester, à se battre, même s’ils sont de moins en moins nombreux, même s’ils sont parqués, humiliés. Ils portent en eux le souvenir, les traditions, la volonté de croire, d’espérer.

C’est un drôle de concept, la terre natale, Ce sont de rôles de concepts, le territoire, la culture, la langue, la famille. Comment ça fonctionne, dans la tête des humains ? Ils sont les enfants de leurs parents. Ils naissent au sein d’une communauté à un moment précis quelque part. Mais d’où vient cette incroyable force collective qui mène le monde depuis toujours : défendre son territoire, son identité, sa langue ? D’où vient cette nécessité, comme innée, depuis le fond des âges, qui veut que l’espèce humaine se batte et s’entretue au nom d’un lieu, d’une famille, d’une différence irréductible ? Pourquoi mourir pour tout ça ? (p99)

Utile car je ne connaissais pas ces épisodes de 1981 donc relativement récents, comme quoi il est toujours nécessaire de les rappeler pour ne pas se retrancher dans le « je ne savais pas » et c’est ce qu’apporte la littérature en s’emparant de faits de société.

J’ai été un peu déroutée au début de ma lecture entre le récit documenté de ces événements et de leur contexte et la partie romancée que j’ai trouvée, pour ma part, assez banale et stéréotypée, avec beaucoup de similitudes avec d’autres du même genre. Il n’hésite pas à ajouter ici ou là des remarques personnelles et pertinentes sur les faits qui ont mené à cette situation et privilégie dans la deuxième partie l’enquête menée par Yves Leclerc, garde-pêche désabusé et ses co-enquêteurs de rencontre.

C’est une lecture agréable et informative  un roman assez court on ne s’enlise pas dans les explications, dans les faits, l’écriture se veut journalistique dans la partie documentée et plus littéraire dans la partie romanesque. L’auteur fait une analyse des événements mais également des attitudes prises :

Avec le temps, on s’est mis à les appeler des Amérindiens. Plus tard, on dira des autochtones. Avant ça, on les a longtemps traités de sauvages (…).Il faut se méfier des mots. Ils commencent parfois par désigner et finissent par définir. Celui qu’on traite de bâtard toute sa vie pour lui signifier sa différence ne voit pas le monde du même œil que celui qui a connu son père.(p36)

La construction et les alternances du récit ont fait que je suis restée un peu à distance. Il y a tellement de sujets abordés, effleurés que j’en suis ressortie avec un sentiment de frustration.

L’on ne peut que se révolter contre l’attitude de certains gouvernement vis-à-vis des autochtones, de tout temps et tout lieu, s’emparant peu à peu de leur territoire et instaurant des lois leur octroyant que contraintes et devoirs. Combien de fois dans l’histoire, l’homme s’est approprié des terres, en maître absolu, alors que les autochtones  estimaient n’être que ses locataires, la respectaient et savaient mesurer leurs besoins par rapport aux ressources qu’elles offraient.

Je vous invite si vous voulez en savoir plus sur ces événements à consulter l’article et la video sur le site de Radio Canada.

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Traduction de Catherine Richard-Mas
Editions Quidam – Août 2018 – 360 pages
Ciao

6 réflexions sur “Taqawan de Eric Plamondon

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