Histoires de la nuit de Laurent Mauvignier

HISTOIRES DE LA NUIT IG

Il ne reste presque plus rien à La Bassée : un bourg et quelques hameaux, dont celui qu’occupent Bergogne, sa femme Marion et leur fille Ida, ainsi qu’une voisine, Christine, une artiste installée ici depuis des années.
On s’active, on se prépare pour l’anniversaire de Marion, dont on va fêter les quarante ans. Mais alors que la fête se profile, des inconnus rôdent autour du hameau.

Ma lecture

Marion avait l’habitude de lire le soir une histoire piochée dans un ouvrage intitulé : Histoires de la nuit à sa fille, Ida, 10 ans, qui s’en délectait sans savoir qu’elles allaient vivre à La Bassée, lieu-dit des « Trois Femmes Seules », l’endroit où elles vivent avec Bergogne, leur mari et père, et Christine, la voisine, une originale, peintre aux cheveux flamboyant, une nuit d’angoisse, loin de tout ce qui a pu les faire frémir car elles vont en être les personnages principaux et qu’il ne s’agit pas là d’un conte sur papier mais d’une réalité.

Difficile d’en dire plus, à part qu’il s’agissait d’une journée comme les autres qui devait se clôturer par une soirée d’anniversaire surprise pour les 40 ans de Marion, organisée par Bergogne, son mari, qui n’a pas encore compris comment une femme comme elle a pu s’intéresser à lui, agriculteur un peu rondouillard et sans charme et à accepter de vivre dans sa ferme isolée. Même Christine, la voisine sent bien qu’il y a quelque chose de bancal dans son couple de voisins mais la présence d’Ida comble les parents par sa présence ainsi que Christine qui se transforme en Tatie bienveillante, elle qui vit au milieu de son atelier en solitaire.

Mais la soirée va réserver bien des surprises et pas celles que l’on attendait…..

Je suis assez partagée par ma lecture…… On nous parlait des frissons, d’un climat pesant mais peut-être qu’à force de le lire et de l’entendre j’ai finalement trop en position d’attente (une fois de plus), et je n’ai pas été terrifiée et ni tenue en haleine plus que cela. Par contre il était indéniablement question d’originalité de style et d’écriture et là oui, je dois avouer que la promesse a été tenue.

Des longues phrases, très longues, trop longues parfois, des successions de sentiments, de pensées, chaque plan entraînant un retour en arrière ou une décortication du ressenti du personnage, de ses pensées intimes parfois bien loin de ce que son attitude peut laisser penser. Des descriptions très précises du lieu, de cet environnement rural, du décor, des objets, et comme le roman comporte plus de 600 pages, je dois avouer que par moments j’ai trouvé que l’histoire de cette nuit n’en finissait pas….. Faire durer le suspens, oui mais il y a eu toute la partie centrale du récit où j’ai commencé à trouver le temps long, trop long, à piétiner d’impatience, à avoir le sentiment que l’auteur en rajoutait pour faire durer le plaisir, utilisant la fin de chapitre sur une phrase qui ouvrait la porte à toutes les suppositions. Alors oui, là il y parvient.

Je ne peux nier une volonté et une qualité d’écriture, maitrisée jusqu’au bout mais avec des variations de rythme, où la promesse de nous faire passer des heures de frisson et de peur pour moi n’a pas été tenue à part peut-être dans les 150 dernières pages où le rythme s’accélère un peu, devient plus prégnant, mais surtout parce que j’avais hâte de connaître le dénouement, le pourquoi du comment et surtout de ressentir ces fameux frissons qui finalement n’ont été qu’une promesse inaboutie. Je m’attendais à un final puissant, qui allait relever l’ensemble et (je rappelle que je ne suis pas spécialement attirée vers les thrillers et autres polars) je me suis retrouvée avec une conclusion digne d’un téléfilm avec des mystères assez banals et un dénouement dans la lignée du genre.

L’auteur jongle avec ses personnages, prend le temps de les révéler petit à petit, comment chacun en est arrivé là, son passé mais aussi ses zones d’ombre qu’il tient cachées, car chacun bien sûr a une histoire, un vécu, un ressenti, des blessures et un quotidien qui n’est pas toujours à la hauteur de ses espérances où de l’image qu’il donne, se répétant parfois, stagnant dans ses narrations parfois mais dont j’ai admiré l’analyse, la profondeur mais en me lassant par moment. Il y a une atmosphère de huis-clos certes  bien rendue en particulier par le lieu où vivent les Bergogne et leur voisine, un lieu qui peut générer à lui seul sentiments d’isolement et d’inquiétudes, où chacun connaît les habitudes et les rythmes de vie des autres, où chaque changement même infime peut prendre une autre signification. C’est surtout cette partie qui m’a finalement plus retenue que l’introduction d’inconnus qui vont bouleverser la routine des jours à La Bassée. Alors oui un roman d’ambiance mais où l’intrigue en elle-même a fait pschitt !

Laurent Mauvignier, que j’avais découvert et apprécier avec Continuer,  est un conteur, il décrit et narre la vie de ces êtres que rien ne distinguent d’autres à part l’isolement où ils vivent, il parvient à nous y introduire et à vivre avec eux une nuit dont chacun ne ressortira pas indemne, à compatir à leur détresse parfois mais fallait-il autant de pages, de phrases, d’élaboration littéraire pour y parvenir et n’aurait-il pas gagner à être plus court sans pour autant sacrifier le style. Mon plus gros reproche finalement c’est qu’il y a disproportion entre l’écriture très travaillée, singulière et une trame assez banale.

J’ai aimé malgré tout mais plus pour la qualité de l’écriture, la volonté de s’y tenir jusqu’au bout, sans faiblesse, de bout en bout mais déçue par le fond qui n’a pas tenu ses promesses pour moi. Encore un roman que j’avais très envie de découvrir et sans être totalement déçue qui n’a pas été à la hauteur de mes attentes.

Retrouvez d’autres avis avec Krol, Au fil des livres, Mon petit carnet de curiosités.

Les Editions de Minuit – Septembre 2020 – 640 pages

Ciao 📚

23 réflexions sur “Histoires de la nuit de Laurent Mauvignier

  1. Je suis en plein dans cette lecture et je suis contente d’avoir votre avis. Pour l’instant je suis totalement d’accord avec vous. Pour moi, l’attente n’est pas angoissante, elle est juste longue (et même un peu agaçante). J’ai l’impression que les promesses ne seront pas tenues et que le dénouement sera terriblement banal. Heureusement le style m’emporte et je trouve les analyses très fines et très poussées (même si ces personnages ne m’intéressent pas plus que ça).Je suis tout de même contente de retrouver ce livre car je le trouve très bien écrit.

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