Mon maître et mon vainqueur de François-Henri Désérable

MON MAITRE ET MON VAINQUEUR IG« Le cahier, c’était la première chose que m’avait montrée le juge, quand tout à l’heure j’étais entré dans son bureau. Sous la couverture souple et transparente, on pouvait lire au feutre noir : MON MAÎTRE ET MON VAINQUEUR.
Sur les pages suivantes, il y avait des poèmes. Voilà ce qu’on avait retrouvé sur Vasco : le revolver, un cahier noirci d’une vingtaine de poèmes et, plus tard, après expertise balistique, des résidus de poudre sur ses mains.
Voilà ce qu’il en restait, j’ai pensé, de son histoire d’amour. »

Ma lecture

Le Roman dont on a beaucoup parlé lors de la rentrée littéraire 2021 mais comme il s’agissait d’une histoire d’amour je l’avais écarté car moi et les histoires d’amour…. Mais j’avais eu vent qu’il s’agissait d’une manière originale de relater une passion amoureuse alors j’ai attendu qu’il soit disponible à la bibliothèque et j’ai fait la connaissance avec l’écriture (érudite) de François-Henri Désérable et bien m’en a pris car ce qui retient, pour moi, ici c’est l’option prise par l’auteur de la raconter.

Mais reprenons depuis le début : le fond de l’histoire est assez banal : le fameux triangle amoureux : la femme, Tina, le mari Edgar et l’amant Vasco mais s’ajoute un quatrième personnage : le narrateur qui pourrait être l’auteur lui-même face à un juge (que l’on rapproche, pour ceux qui ont lu, à celui du roman de Tanguy Viel  Article 353 du code  précisant même son côté « humaniste » des fois que l’on ait pas compris…) qui est en possession d’un cahier Clairefontaine dans lequel figurent des haïkus et poèmes écrits par Vasco sans autre explication de celui-ci sur les faits qui lui sont reprochés et que l’on découvre qu’en toute fin du roman. Le juge demande au narrateur, ami de Vasco, de lui confesser ce qu’il sait de cette relation dont il se sent partie prenante puisqu’il est celui qui a présenté Tina à Vasco, que c’est ainsi que les deux amants vont vivre une folle passion amoureuse qui conduira Vasco à se procurer une arme au passé sulfureux et à se retrouver en prison….

Pour l’histoire d’amour, rien de bien original sauf qu’elle baigne dans un environnement littéraire, Tina étant comédienne et passionnée de poésie et que Vasco travaille à la BNF, a accès à des ouvrages précieux et possède une maîtrise des haïkus, des verset, le sens de la mise en scène. François-Henri Désérable mêle à une écriture de qualité indéniable, riche, agrémentée d’un soupçon d’humour, parsemant de quelques grains de connaissances historiques sur Voltaire, Verlaine, Rimbaud etc… sans oublier quelques clichés photographiques pour appuyer ses dires qui font toute l’originalité de ce roman. Au fil des pages cela devient une sorte de récit tragi-comique d’une relation adultère dont Vasco sera le « fou d’amour » ne s’interdisant aucun subterfuge pour conserver l’amour de Tina.

C’est justement ce que j’ai aimé dans ce roman : la construction, le ton de la narration et son originalité, la manière de s’inclure soi-même et de faire régulièrement des apartés personnels ou avec le juge et parfois le greffier. Si la situation de Vasco n’était pas si tragique on pourrait presque en rire de tous les stratagèmes utilisés (pas très crédibles d’ailleurs mais bien imaginés) pour séduire et récupérer la belle Tina car on le sait les histoires d’amour finissent mal en général et face à un mari et deux enfants (et un futur mariage) il doit faire preuve d’imagination et d’originalité mais parfois à trop en faire cela décrédibilise l’ensemble. Et puis on sent le plaisir que l’auteur a pris à le faire (ou tout du moins on ressent une certaine jouissance dans la narration) à faire de ses personnages des pantins dont il s’amuse à tirer les ficelles, à se mettre lui-même en scène et à faire de son interlocuteur, le juge, une sorte témoin-complice.

Oui j’ai aimé mais uniquement pour la forme, le ton et l’originalité du propos car l’histoire d’amour en elle-même n’est qu’un prétexte à un exercice de style ma foi réussi et plaisant à lire, une lecture finalement plus distrayante que tragique et j’avoue avoir longtemps hésité à savoir si j’avais aimé ou beaucoup aimé vu l’engouement général mais oui j’ai aimé, il est court, original, érudit mais je n’ai pas eu le petit « frisson » que je ressens lors de la lecture ou une fois le livre refermé, signe d’un plaisir plus intense.

Grand prix du Roman de l’Académie Française 2021

Editions Gallimard – Août 2021 – 188 pages

Ciao 📚

11 réflexions sur “Mon maître et mon vainqueur de François-Henri Désérable

  1. Je n’arrive pas à être plus attirée que cela par ce roman, de toute évidence pour le sujet de base qui m’incite plus à prendre la tangente (comme toi). Bien que la construction et le style semblent lui donner du relief d’après ce que tu en dis, je ne sais pas encore si je me laisserai tenter par ce titre quand je le croiserai en médiathèque.

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  2. Je suis fan de cet auteur, que j’ai eu la chance de rencontrer l’année où il a gagné le Prix du livre Express. Je faisais partie du jury et j’avais défendu son roman de tout mon coeur, je l’avais adoré (Evariste). J’ai beaucoup aimé celui-ci aussi, peut-être un chouïa moins que le génial Piekelny, mais beaucoup quand même !

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